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En ce début de mai de gelées tardives et de giboulées, les éclaircies sont bien plus crues que par temps sec, où le paysage est « bu » par le soleil  (comme dirait François Cheng, De l’Âme). Cette lumière violente, avive les couleurs, pourtant immatures, de la campagne, à cette époque: les blés sont encore verts ; les champs de jachères,  fraichement retournés, terreux ; les lins, en pâles boutons. L’asphalte, laqué par l’eau,  semble retrouver sa viscosité. Dans ce paysage imprégné d’humidité, prendre la route, c’est prendre le risque de ne jamais s’arrêter, en tout cas, c’est vouloir retarder le crépuscule, dont on  s’étonne, avec le décalage horaire imposé, qu’il n’advient que  vers 21 heures ; ou  encore, c’est vouloir fixer ce moment pour qu’il dure une éternité,  pour évoquer un espace  qu’aucun grand angle ne pourrait reconstituer, et ce sentiment, comme  reconnaissant, d’appartenir à cette immensité éblouissante (entre Chaumont-sur-Loire et Loches, sur quelques cinquante kilomètres, seulement

JOUNAL DE CAMPAGNE ILLUSTRE 

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